Comme Autrice

Bleuenn est bouchère. Bleuenn est femme. Bleuenn est une animale.

Elle est dans une chambre froide, seule. Et parle.
Elle est bleue, tendre, saignante, à point, maturée, fumée. Vide aussi, parfois.
Elle porte une fourrure, elle s’auto-découpe, elle fait baver d’envie, elle mord.

Elle est chienne, vache, truie – objet ou sujet ?
Elle chante, dompte, torée, boxe, prie et se met du persil dans le nez.

Elle invoque Lilith, Anaïs Nin, Nicky de St Phalle. Elle arme un fusil. Elle peint les parois des cavernes. Elle couve et s’avorte. Elle distribue des tranches de boudin (noir, évidemment). Elle a si longtemps obéi.
Elle fait le point avec son nombril, ses aïeules, la Vierge, ses règles, son Oedipe, ses souvenirs.
Elle partage ses meilleures recettes (le pâté de bécasse, les câpres dans la blanquette).
Elle traverse, en flash-back, une histoire d’amour dévorante, genre viande de chez mamie, qu’on sauce jusqu’à devoir défaire un bouton, jusqu’au jour où, les yeux dans l’assiette, on se demande qui mange qui.

Elle met tout à plat, sans fard. Convoque des figures sororales et parfois radicales pour combattre la solitude et oser, de sa chambre froide, enfin, pousser la porte.

Elle voit plus loin que le bout de son museau et découvre qu’ailleurs l’air peut être doux.